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CÔTE D’IVOIRE/A L’APPROCHE DES LEGISLATIVES : L’opposition se déchire

L’opposition ivoirienne qui a décidé d’aller aux législatives en rangs serrés afin de les remporter et contrôler le Parlement pour opposer un véritable contre-pouvoir à Alassane Ouattara, tiendra difficilement ce pari. En cause des dissensions qui la minent au point où chaque entité n’exclut plus de ranger au placard la solidarité et d’agir suivant ses propres intérêts.

On se rend bien compte que le choix qu’avaient à faire les opposants ivoiriens entre participer aux législatives prévues le 6 mars prochain ou les boycotter et présenter le pouvoir en place comme un régime antidémocratique est la face visible de l’iceberg des profondes divisions qu’ils ont à gérer. A mesure qu’approchent ces joutes électorales auxquelles elle a décidé de prendre part, l’opposition ivoirienne ne rate plus d’occasion d’étaler, chaque jour un peu plus sur la place publique, les fractures qui la traversent et auxquelles il lui sera difficile de survivre.

Mue par une dynamique que l’on pourrait qualifier de « tout sauf Ouattara et le RHDP », l’opposition ivoirienne a fait, sans véritable conviction, chorus autour de la volonté de mettre dans une mauvaise posture Alassane Ouattara dont elle n’a de cesse de contester le 3e mandat jugé anticonstitutionnel. Conséquence, les divergences d’opinions et de stratégies ont vite fait d’émerger, présentant des leaders politiques moins sereins qu’ils ne tentent de le faire croire.

Ainsi, pendant que la plupart des formations politiques de l’opposition militent pour une participation tous azimuts à la députation pour se donner une chance d’exister dans le nouveau paysage politique de Côte d’Ivoire, Guillaume Soro, ancien président de l’Assemblée nationale ivoirienne, dauphin constitutionnel d’Alassane Ouattara tombé en disgrâce avec son mentor depuis qu’il a fait montre de ses ambitions pour le fauteuil présidentiel, plaide pour la non-participation au risque de « légitimer » le 3e mandat d’affilée de l’ex-Directeur général adjoint du Fonds monétaire international (FMI), à la tête de la Côte d’Ivoire depuis dix ans.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que le député de Ferkessédougou, qui quittera son siège à l’issue des législatives du 6 mars prochain, et dont le mouvement politique Générations et peuples solidaires (GPS) vient de subir une saignée avec le retour, au Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP), de plusieurs de ses cadres, ne verra pas prospérer son vœu de boycott de ces élections. Non seulement au sein de l’opposition où les formations sont présentement à la recherche de l’oiseau rare pour gagner dans les différentes circonscriptions à l’issue du scrutin législatif, mais aussi dans son propre camp où l’un de ses lieutenants, Alain Michel Agniman Lobognon, a déposé, samedi dernier à la Commission électorale indépendante (CEI), son dossier de candidature. Le député sortant de Fresco tournait ainsi le dos à l’appel au boycott de son leader et accentuait davantage le malaise au sein de GPS.

En attente de son procès en appel, après avoir été acquitté en première instance par les juges de la Cour pénale internationale (CPI), Charles Blé Goudé, président du COJEP, a annoncé, lundi dernier, le retrait de son parti de toutes les coalitions politiques au sein desquelles il militait. Dans son comité, le dernier ministre de la jeunesse de Laurent Gbagbo pointe l’hypocrisie sur laquelle sont bâties les relations des formations politiques de l’opposition. « L’annonce des élections législatives, qui devrait être saisie comme une opportunité pour renforcer la cohésion et l’unité de l’opposition, a malheureusement mis au grand jour les appétits et autres guerres de positionnement entre des entités pourtant supposées être des partenaires. Les attitudes et les procédures de prises de décisions frisent le mépris et indiquent que la priorité et le sens de l’action politique ne demeurent nullement les intérêts du peuple comme le font croire les déclarations publiques », dénonce Charles Blé Goudé.

Selon une source proche de l’ancien leader estudiantin, alors que dans de nombreuses localités les populations réclament comme candidats les cadres issus du COJEP, des partis plus anciens comme le PDCI et le FPI, contre tout esprit démocratique, rejettent le vœu de la base pour imposer leurs choix. Une attitude, à en croire toujours la même source, qui acte un peu plus la division de l’opposition politique ivoirienne qui peine à s’exprimer d’une même voix à un peu plus d’un mois des législatives dont le délai de dépôt des candidatures vient d’être repousser par la Commission électorale indépendante (CEI).

Divisée comme elle l’est présentement, l’opposition ivoirienne risque de passer à la trappe du RHDP qui veut se donner les moyens de remporter les législatives et permettre à Alassane Ouattara de dérouler son projet de société pour les cinq années à venir. Une chose est certaine, si les partis de l’opposition se murent dans leur division actuelle, ils vont chuter si violemment au lendemain du 6 mars prochain, qu’il leur sera difficile voire même impossible de se relever.

Serge YAVO

 

 

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