Procès de la honte à Abidjan: «Charles Blé Goudé ne peut pas être jugé ici parce que les autorités ivoiriennes, y compris les autorités judiciaires… ont décidé de renoncer à leur droit» (Avocats)
Les avocats de Charles Blé Goudé claquent la porte à son procès « ressuscité » à Abidjan, alors que se profile à la CPI, une libération totale de ce dernier et de Laurent Gbagbo, son co-accusé, pour crimes de guerre. Le mercredi 6 novembre 2019, au troisième round du procès, ils ont expliqué leurs raisons. Ci-dessous la déclaration de Me Claver N’Dry.
Nous réclamons que nous soit transmise une pièce importante. Cette pièce concerne purement et simplement le transfèrement de M. Charles Blé Goudé à la Cour pénale internationale. C’est une pièce qui est relative à l’audience qui s’est tenue exactement ici dans cette même salle, le vendredi 21 mars 2014. J’y étais. Mes confrères aussi. Et nous avons jugé que cette pièce était importante.
Pourquoi ? La Côte d’Ivoire avait la possibilité de juger M. Charles Blé Goudé pour les faits relatifs à la crise post-électorale. La Côte d’Ivoire a décidé de livrer M. Charles Blé Goudé, de le transférer à la CPI. Il s’y trouve. Il a fait 5 ans de procédure pour un acquittement à l’heure actuelle. Et comme par extraordinaire, cette même justice vient s’auto-saisir pour se déclarer compétente.
Ce n’est pas comme ça que ça fonctionne dans une démocratie. Nous avons dit que cette pièce était importante. Pour l’heure, les avocats ont estimé que M. Charles Blé Goudé ne peut pas être jugé ici parce que les autorités ivoiriennes, y compris les autorités judiciaires, ont décidé de renoncer à leur droit de poursuivre au plan national au profit d’une juridiction internationale. Alors, au moment où Charles Blé Goudé fait face à cette justice internationale, on ne peut pas, sous d’autres qualifications, d’ailleurs abrogées par les derniers textes (article 564 du code pénal qui abroge les dispositions anciennes) visés par le juge d’instruction, à savoir «crimes contre populations civiles» et «crimes contre prisonniers de guerre», qui n’existent plus dans notre législation.
Comment est-ce qu’on peut continuer de poursuivre un citoyen sur la base de ces textes abrogés ? La Chambre d’instruction, estimant que l’audience pouvait donc se poursuivre, nous avons dit que ça n’était pas possible. Nous avons une pièce qui nous est donnée seulement hier (ndlr : mardi 5 novembre dernier) à 12h 26, vous nous demandez de vous produire, aujourd’hui, un mémoire oral. Nous avons donc échangé sur cette question. Et comme ils semblaient ne pas nous entendre, ce que nous avons demandé, et que nous estimons légitime pour les droits de la défense, le collectif a donc décidé de se déporter de cette affaire.
Nous ne sommes plus donc dans cette affaire. Nous l’avons fait connaître à la Chambre. S’ils veulent poursuivre la procédure comme ils veulent, qu’ils la poursuivent mais c’est sans nous .
Recueillis par Elvire Ahonon, afriksoir.net