Les anciens présidents ivoiriens Laurent Gbagbo (LG) et Henri Konan Bédié (HKB) auraient voulu mettre la pression sur Alassane Ouattara (ADO) qu’ils ne se seraient pas pris autrement. Avec en toile de fond la question de la réconciliation nation dont le processus, il faut le reconnaitre, patine, les deux leaders de l’opposition entendent profiter de l’actuelle situation de décrispation pour engager le pays sur la voie de la conquête d’une paix durable.
C’est l’ex-détenu de la CPI, de retour dans son pays, après un acquittement historique devant les tribunaux internationaux, qui a ouvert le feu, le premier. Le 27 juillet dernier, alors qu’il racontait Alassane Ouattara pour la première fois depuis leur débat d’entre-deux tours de la présidentielle de 2010, Laurent Gbagbo a inoculé une petite dose de pression à son hôte. Il a, en effet, mis sur la table la question de la libération des prisonniers des crises politiques en Côte d’Ivoire, prenant le soin de mentionner que le dernier mot revenait au président Ouattara.
Cette posture de LG, selon une source à la présidence ivoirienne, embarrasse énormément le locataire du palais du Plateau. « En évoquant la libération des prisonniers et en remettant le dossier entre les mains du président, Laurent Gbagbo exerce une pression. Il montre aux yeux de l’opinion qu’il a fait sa part, la balle étant désormais dans le camp d’Alassane Ouattara », fait savoir cette source.
Mais, la pression que ressent ADO vient aussi de son propre clan. En effet, au sein du RHDP, la question de la libération des prisonniers fait débat. Les avis sont tranchés et plusieurs cadres verraient d’un mauvais œil cette élargissement d’autant plus qu’il est de plus en plus question d’ouverture d’instruction judiciaire de la CPI à l’encontre de certains cadres pro-Ouattara. « On voit mal que les pro-Gbagbo soient dehors et que des proches du président Ouattara soient devant les tribunaux internationaux. Cette question doit être examinée avec le plus grand sérieux par le président pour ne pas susciter la colère des militants », estime un élu RHDP qui a requis l’anonymat.
La question de la libération des prisonniers met ADO sous pression, tout comme celle du dialogue politique inclusif que réclame HKB. Jeudi 5 juillet 2021, la presse a fait un large écho de la missive du président du PDCI, dans laquelle il demande au chef de l’Etat de faire en sorte que ce dialogue se tienne, d’autant plus qu’au cours d’une rencontre le 11 novembre 2020, « la décision commune avait été prise pour l’ouverture d’un dialogue politique inclusif pour la réconciliation et la paix ».
Et comme si la pression n’était pas assez forte, HKB s’est lui aussi saisi de la question de la libération des prisonniers. Cette fois-ci, il n’a pas pris de gants. « Je vous demande de prendre par une volonté politique forte, le leadership du processus de réconciliation nationale, par la libération générale des prisonniers des crises sociales que nous avons subies », écrit M. Bédié.
Même s’ils ne se font pas d’illusion quant à la prise de décisions fermes concernant ces questions, au cours de la célébration de l’indépendance, samedi 7 août, LG et HKB ont réussi, en mettant ces sujets sur le bureau d’ADO, a attiré son attention sur l’intérêt que leurs accordent ses concitoyens. Tôt ou tard, il va falloir trancher car, comme le dit le président du PDCI, « l’évolution de la situation sociopolitique montre que le moment est venu de se parler et de se réconcilier « .
Serge YAVO