Ancien membre de la rébellion armée (2002-2011) et proche de Guillaume Soro, Mamadou Traoré, regrette amèrement l’insurrection armée menée contre le régime de l’ex président Laurent Gbagbo acquitté par la CPI et dont d’importantes restrictions ont été levées le jeudi 28 mai dernier. Ci-après, ses aveux sur le fondateur du FPI, Laurent Gbagbo.
Il est courant d’entendre les gens dire que, si pendant ou après ton passage à la tête d’une structure ou d’un État, les gens continuent toujours de parler en bien de ton prédécesseur et qu’ils regrettent son passage, c’est que malgré tous tes efforts, tu n’as pas réussi à être à sa hauteur. Malgré tous tes efforts, tu n’as pas réussi à effacer ses traces. Ça voudrait clairement dire que tu as échoué à faire mieux que ton prédécesseur. En faisant allusion à ces propos, je pense à ces nombreux admirateurs d’hier du gourou du Restaurant que nous étions, qui regrettons aujourd’hui le passage de Laurent Gbagbo à la tête du pays.
LE Woody de Mama n’a certes pas été un dirigeant parfait. Il n’a pas été un ange. Mais, il a été un dirigeant humain. Il a été un dirigeant avec la main sur le cœur. C’est vrai que sous lui nous avons connu le charnier de Yopougon. Mais ce charnier n’était-il pas la conséquence de la protestation de sa victoire par les gens de la Case ? C’est vrai que sous lui nous avons connu les escadrons de la mort. Mais l’existence de ces escadrons de la mort n’était-elle pas la rébellion que nous avons déclenchée, avec la bénédiction et le soutien du gourou du Restaurant, pour déstabiliser son pouvoir ? On me dira que son fidèle lieutenant Blé Goudé entretenait des jeunes patriotes et que ces derniers ont assassiné de nombreux militants de la Case. Mais la question qu’on pourrait se poser est la suivante. S’il n’y avait pas eu rébellion, soutenue et encouragée par la Case et ses dirigeants, les jeunes patriotes auraient-ils existé ?
Je dirai non. Il faut donc conclure que le charnier de Yopougon, les escadrons de la mort et les jeunes patriotes sont la conséquence des actions de déstabilisation de la Case vis-à-vis de son pouvoir. On pourrait donc dire que Laurent Gbagbo était en légitime défense face aux actions de déstabilisation avérées de son pouvoir. Il n’a donc fait que de trouver des moyens, certes pas catholiques, pour défendre son régime. Nous l’avons combattu. Nous avons même applaudi sa capture et son transfèrement à la CPI. Nous avions naïvement cru, qu’avec le gourou du Restaurant que nous avons contribué à faire venir au pouvoir, la Côte d’Ivoire deviendrait un pays véritablement démocratique. Nous avions naïvement cru qu’avec le gourou du Restaurant au pouvoir, il n’y aurait plus d’exclusion d’opposants farouches à la course au pouvoir.
Nous avions naïvement cru qu’avec le gourou du Restaurant au pouvoir, la Côte d’Ivoire deviendrait une sorte d’Eldorado vu le CV impressionnant de ce gourou qu’on nous a présenté. Le constat que nous faisons malheureusement aujourd’hui , c’est que pendant de longues années nous nous sommes bercés d’illusions. Et aujourd’hui, nous le regrettons sérieusement. Aujourd’hui, nous regrettons le passage de Laurent Gbagbo à la tête du pays. Et ce regret est l’échec du gourou du Restaurant. Nous regrettons de l’avoir combattu pour le gourou du Restaurant. On me dira que ce dernier a construit des ponts, qu’il a fait des routes et que Laurent Gbagbo n’a rien construit. Je dirai que c’est normal qu’il n’ait pas eu l’occasion de réaliser tout ce que son remplaçant a pu réaliser, en terme d’infrastructures.
C’est normal parce que contrairement à son remplaçant, il n’avait que 40 % du pays à gérer tandis que ce dernier a eu à gérer la totalité du pays. En outre, confronté à la rébellion, conduite par l’homme de mission du gourou du Restaurant, Laurent Gbagbo n’a pas eu l’opportunité de penser à des projets de développement de grande envergure. Son projet essentiel était devenu la gestion de la crise avec en prime l’organisation des élections présidentielles. Je suis convaincu que s’il avait eu l’opportunité de gérer la totalité du pays dans un climat de paix, il aurait peut-être fait mieux que le gourou du Restaurant avec un accent particulier sur le social. Bref, il aurait peut-être lui-même construit des routes et des ponts, cette fois-ci de qualité. Pas comme ces routes et ces ponts biodégradables qu’on nous a servi sous la gouvernance du gourou du Restaurant.
Loin de moi l’idée de faire de Laurent Gbagbo un saint et le meilleur chef d’État du pays. Sous son règne, nous avons également connu des tueries et des assassinats contrairement au règne du gourou du Restaurant. C’est vrai que ce dernier a été sans cœur avec les Ivoiriens. Mais son règne n’a pas été émaillé par des assassinats en cascade bien que nous n’avions pas oublié celui de Soro Kognonà Korhogo, dans le village de son poulain. Mais je peux affirmer aujourd’hui que Laurent Gbagbo a été meilleur que celui qui l’a remplacé. C’est pourquoi aujourd’hui, beaucoup de Soroïstes dont moi, regrettons le fait de l’avoir combattu. C’est pourquoi aujourd’hui, je me met à genoux devant lui pour lui demander pardon. Pardon de l’avoir combattu pour rien. Pour des chimères. Je reconnais avoir été manipulé. J’étais encore jeune à l’époque. Donc facilement manipulable. Mais aujourd’hui à 54 ans dans quelques semaines, précisément le 30 juin, je ne vois pas qui va encore me manipuler.
Je suis aujourd’hui suffisamment mature pour moi-même manipuler. Et je souhaiterais également qu’il pardonne à mon leader Guillaume Soro qui n’attend qu’il lui fasse signe afin qu’il aille en personne lui demander pardon comme il l’a promis en 2017. Ce projet de demande de pardon qui lui a valu des volets de bois verts provenant du Restaurant. Tous, nous avons été induits en erreur. Nous avons été utilisés pour le combattre pour quelqu’un que nous ne connaissions pas vraiment.
En résumé, si aujourd’hui beaucoup d’Ivoiriens qui ne sont pas militants du FPI regrettent aujourd’hui le passage de Laurent Gbagbo, c’est que celui qui l’a remplacé n’a pas été à sa hauteur en matière de gouvernance humaine. Mais il faut qu’on se le tienne pour dit. Mon candidat pour les élections présidentielles d’octobre c’est Guillaume Soro. C’est lui qui pourra réconcilier les Ivoiriens et les faire vivre dans un havre de paix et prospère. Nous avons tenté l’aventure d’ Houphouët-Boigny, l’aventure de Bédié, l’aventure de Guei, l’aventure de Gbagbo et l’aventure de Ouattara. Tentons maintenant l’aventure de Soro et je peux vous garantir que nous ne le regretterons pas comme nous regrettons aujourd’hui l’aventure actuelle. Il a appris de ses erreurs passées et aux côtés de Bédié, de Gbagbo et de Ouattara, il a suffisamment appris à gouverner. Sa gouvernance sera le réceptacle de toutes les expériences positives de ces chefs d’État qu’il a eu à côtoyer. Voter donc pour Guillaume Soro, c’est voter pour des lendemains meilleurs.
Merci.
Source: Afrique-sur 7