Après le procès de Jacques Mangoua, Konan Kouadio Siméon (KKS) crache des vérités crues à Alassane Ouattara et au Rhdp: «Attention à la goutte d’eau qui peut déborder le vase !»
Monsieur le Président,
Comme toujours, c’est avec le respect des autorités établies que m’impose ma culture spirituelle et religieuse que je m’adresse à nouveau à vous, à travers la présente lettre ouverte, pour vous réitérer encore une fois de plus, ma plus grande préoccupation relative à la situation sociopolitique de notre pays. Vous voudriez bien pardonner mon audace et mon insistance agaçantes qui ne trouvent leurs excuses que dans la peur des pressentiments persistants qui m’envahissent, au jour le jour, au regard des développements actuels.
Monsieur le Président,
Il y a de cela 1 an, par courrier en date du 04 septembre 2018, je sollicitais auprès de votre excellence une audience aux fins d’un échange sur l’état de la nation. Comme à ma première demande, j’ai eu l’honneur, sur vos instructions, d’être reçu par le Ministre auprès du Président de la république chargé des affaires politiques à qui j’ai exposé, à votre attention, mes craintes d’un processus difficile, voire d’un blocage du processus électoral s’il n’était pas précédé par un processus de dialogue inclusif et de réconciliation sincère aux fins de dégager un consensus national pour des élections paisibles. Je recommandais alors l’organisation d’une concertation nationale inclusive, avec donc toutes les forces vives de la nation, pour parvenir à ce nécessaire consensus en envisageant, vus le contexte et l’exigence temporelle, une transition consensuelle dès la fin de votre mandat, c’est à dire, dès la fin du mois d’octobre 2020. J’attends toujours de pouvoir vous en démontrer le bien-fondé, à la fois pour vous-mêmes et pour la nation.
J’ai conduis cette même démarche en direction des autres acteurs de la scène et notamment des Présidents Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo.
Depuis, je multiplie les consultations, les déclarations et les conférences pour en expliquer les raisons profondes dans la perspective de l’incontournable réconciliation nationale et de la paix en Côte d’Ivoire.
Monsieur le Président,
Si j’insiste tant, c’est parce-que je considère qu’il est un devoir pour tout citoyen et bien plus pour celui qui consacre depuis bientôt 19 ans sa vie comme un sacerdoce pour la réconciliation et la paix, de tirer la sonnette d’alarme quand le navire de la patrie vogue si dangereusement tout droit en direction du précipice. Oui Monsieur le Président, si de votre position, vous n’entendez pas la grogne du peuple et n’apercevez pas les gros nuages noirs dans le ciel Ivoirien, c’est que vous êtes bien éloignés des réalités pratiques de la Côte d’Ivoire. Il serait alors urgent d’opérer un rapprochement avec le peuple en descendant d’un cran de votre tour d’ivoire d’où la perception lointaine, trop lointaine, les flatteries des renards de tout poil, les chiffres et les rapports dithyrambiques de proches et d’obligés mus par leurs propres intérêts, altèrent votre appréciation de la réalité. Croyez-moi Monsieur le Président, je vous parle de la vallée du peuple, ça sent déjà à mille lieues le roussi.
Avec :
-l’instauration de la carte nationale d’identité (CNI) à 5000 FCFA dans un pays où au moins 1 personne sur 2 ne dispose à peine que de 500 FCFA par jour pour se nourrir ;
-le passage en force pour une Commission Électorale Indépendante (CEI) non inclusive et manifestement inféodée, là où le monde entier conseillait le consensus ;
-le curieux projet de modification de la constitution à quelques mois de la présidentielle ;
-l’éventuel projet de candidature pour un 3e mandat, là où vos propres experts et conseillers clament que la constitution ne le permet pas ;
-le maintien en détention des prisonniers militaires de la crise post-électorale de 2011 pendant que même leurs adversaires d’armes d‘hier réclament leur libération
etc…
Votre régime, Jour après jour, jalon après jalon, réunit inconsciemment ou consciemment, les conditions d’une crise pré-électorale qui pourrait s’avérer majeure. Manifestement et de toute évidence, le vase semble plein.
Attention à la goutte d’eau qui peut déborder le vase ! En l’occurrence, ce qui apparaît clairement comme une chasse aux sorcières avec l’incarcération tous azimuts d’opposants dont le seul tort serait d’oser obéir à leurs convictions politiques en refusant de rejoindre le RHDP, votre parti, en plus de votre politique inique de ‘’rattrapage ethnique’’ qui frappe déjà si durement et si injustement les ivoiriens des autres ethnies, pourrait bien, s’il devait continuer, constituer la goutte de trop qui déborde le vase. L’indignation générale et les manifestations qui auraient déjà occasionné mort d’homme et de nombreux blessés suite à l’arrestation au mépris de la présomption d’innocence, la détention nonobstant les solides garanties de représentativité et la condamnation après un procès expéditif, de Monsieur Jacques Mangoua, élu et Président du conseil régional du GBEKE, en est une démonstration éloquente.
Vous remarquerez Monsieur le Président, que dans l’affaire ‘’similaire’’ de cache d’armes à Bouaké où plusieurs tonnes d’armes de guerre avaient été découvertes dans un domicile courant mai 2017, le propriétaire de la résidence n’a été arrêté qu’en octobre après plusieurs convocations et auditions régulières. Placé sous mandat de dépôt, il a été remis en liberté sans jugement donc sans aucune condamnation. Quant à monsieur Mangoua, pour quelques machettes et quelques munitions qu’il a lui-même signalées à son domicile, 72 heures ont suffit à le condamner. Deux poids, deux mesures ! Bien loin de l’Etat de droit que vous nous avez promis.
Attention à ne pas trop tirer sur la corde car elle pourrait bien finir par se casser !
Dans ce contexte sous régional explosif que nul ne connait mieux que vous, la Côte-d’Ivoire ne peut se permettre d’entretenir à nouveau un conflit ouvert sans exposer fatalement nos populations à l’avidité brutale et meurtrière de tous les rapaces et autres sanguinaires inhumains qui pullulent à nos frontières, scrutant en permanence les airs à la recherche de fumée pour fondre sur leur proie.
Monsieur le Président, si vous avez vraiment de l’amour pour cette nation et je ne doute pas que vous en ayez, Je vous en supplie par la compassion de Dieu, ne portez pas cette responsabilité. Ouvrez sans délai le dialogue et construisons ensemble le consensus nécessaire pour éviter à nos populations qui ont déjà assez enduré, des souffrances supplémentaires.
Dieu bénisse la Côte d’Ivoire !
Très haute considération
Konan Kouadio Siméon (KKS)
Candidats aux élections présidentielles 2010 et 2015
Président de Initiatives Pour la Paix en Côte d’Ivoire (IPPCI)