Le drapeau européen constitue l’objectivation de l’Europe la plus réussie de par sa notoriété et son succès populaire. Dans la manière dont il est donné à voir, il renseigne sur les spécificités du système politique qu’il représente et sur ses modalités de légitimation. L’étude de la création du symbole et de ses usages permet d’éclairer le processus d’encodage social et culturel de l’emblème aux douze étoiles. Elle montre comment l’on passe d’un simple artefact institutionnel dicté par une conjoncture historique particulière à un signe politique fort investi d’une certaine valeur, sans toutefois atteindre le niveau d’icône politique qui est celui de certains de ses homologues étatiques.
Le drapeau européen se comprend de façon privilégiée en interaction et en comparaison avec les drapeaux nationaux, dont certains apparaissent comme des références particulièrement utiles : le français, comme archétype d’incarnation d’un État théâtralisé ; l’américain, renvoyant comme les douze étoiles européennes à un référent à plusieurs niveaux mais infiniment plus sacralisé ; l’allemand, illustration d’une transition symbolique suite à la réunification ; le polonais, pour lequel le référent religieux reste très prégnant ; le britannique, comme vecteur de résistance acharnée à l’emblème communautaire.