Laurent Gbagbo, acquitté par la CPI en mars dernier et revenu en Côte d’Ivoire depuis le 17 juin, fait l’actualité dans le pays. L’annonce lundi dernier de son divorce avec Simone Ehivet Gbagbo, son épouse depuis 1989, a encore plus braqué les projecteurs sur celui que l’on surnomme « Le Woody de Mama ».
Lundi 21 juin, par le truchement de son conseil Maître Claude Mentenon, l’ex-chef d’Etat ivoirien, dévoilait sa volonté de se séparer de son épouse Simone Gbagbo qui fut avec lui dans sa lutte pour la conquête du pouvoir, de la clandestinité à la Présidence et à son arrestation en 2010, en passant par la création officielle du Front populaire ivoirien (FPI).
« Monsieur Laurent GBAGBO annonce qu’en raison du refus réitéré depuis des années de Dame Simone Ehivet de consentir à une séparation amiable, au demeurant de règlement appropriée à leurs statuts personnel et politique réciproques, il s’est résolu à saisir ce jour, le Juge des affaires matrimoniales du Tribunal de Première Instance d’Abidjan, d’une demande de divorce », lit-on dans la note signée de Maître Mentenon.
Cette annonce a suscité de l’émotion dans l’opinion ivoirienne, tant chez les partisans de l’ancien président que chez ses adversaires. Les uns estimant que cette affaire ne regarde que les époux Gbagbo, quand les autres dénoncent la manière dont l’ex-première dame est traitée par son mari. C’est le cas du politologue Sylvain N’guessan, interrogé par un confrère. « Ce n’est pas le divorce en tant que tel qui gêne, mais cette volonté manifeste d’humilier. Quiconque a un peu d’humain en lui, devrait ressentir une certaine blessure. On n’humilie pas devant la planète entière celle avec qui on a vécu tant de misères », condamne-t-il.
Si l’analyste politique critique la manière utilisée par Laurent Gbagbo pour annoncer son divorce avec Simone, il faut dire que l’onde de choc créée par cette séparation de deux icônes du FPI va créer encore plus de turbulences au sein de ce parti qui souffre d’un bicéphalisme depuis sept ans.
En effet, le FPI n’avait pu réussi à maintenir son unité, au lendemain de la chute du régime des Refondateurs. Affi N’guessan, premier ministre de Gbagbo jusqu’aux accords de Marcoussis, a pris une autre trajectoire jugée proche du nouveau pouvoir RHDP quand ceux qu’on nomme les « Gbagbo ou rien » ont décidé de s’opposer à Alassane Ouattara dont ils ne reconnaissaient pas la légitimité.
Alors que d’aucuns pensaient que le retour de Laurent Gbagbo enclencherait la réconciliation au sein du FPI, cette déclaration de divorce va incontestablement orchestrer une autre fracture chez les Frontistes. « Il faut craindre que ce nouveau front ouvert dans la crise qui secoue le FPI depuis sept ans, ne contribue à fragiliser davantage le parti dont Simone et Laurent Gbagbo sont tous deux membres-fondateurs », analyse Sylvain N’guessan.
Une guerre de clans, estiment des observateurs, n’est pas à exclure. Même si Simone Gbagbo n’a pas encore réagi publiquement à la déclaration abondamment commentée sur les réseaux sociaux, on imagine qu’elle ne restera pas coite devant l’évolution des événements. Toujours vice-présidente du FPI, Simone, même divorcée de Gbagbo, reste toujours populaire et nombreux sont les militantes et militants qui se reconnaissent en elle. Le divorce Laurent-Simone Gbagbo tombe mal pour l’ancien parti au pouvoir qui devra gérer cette affaire de cœur comme une affaire politique s’il ne veut pas en subir les inconvénients qui ne vont pas tarder à émerger.
Serge YAVO