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C.I. / A QUELQUES JOURS DU 18 0CTOBRE: Le Sénateur Michel Coffi Bénoît dévoile un secret sur Houphouët Boigny

Michel Coffi Bénoît est sénateur et surtout l’une des personnalités marquantes du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Dans l’interview qui suit, l’ancien Député-Maire PDCI d’Anyama  dévoile l’une des faces cachées de l’ancien Président Houphouët Boigny.  

 Monsieur COFFI MICHEL, pouvez-vous nous dire quand et comment vous est venue l’idée de faire un témoignage sur votre appartenance à la famille des houphouëtistes ?

 Michel Coffi Bénoît : Certes, le RHDP, parti politique auquel j’appartiens en ce moment est composé des membres de la famille des houphouétistes, mais mon témoignage n’est pas celui de mon adhésion à cette famille.

J’ai bien précisé dans mon écrit qu’il s’agit de quand et comment moi, Michel Coffi, je suis devenu houphouëtiste. Il y a une nuance et elle est de taille.

Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur cette nuance ?

M.C.B : Bien sûr ! On décide d’adhérer à un parti politique pour des raisons idéologiques ou politiques en fonction de notre sensibilité. Dans ce cas, on peut démissionner du parti en question s’il s’écarte des objectifs qui ont présidé à sa création. Mais l’houphouétisme, c’est plus qu’un groupement politique et on ne peut pas en démissionner. Il vous prend dans votre être et vous envoûte littéralement.

Tous ceux qui ont côtoyé le Président Félix Houphouët Boigny l’ont trouvé grand, très grand et digne d’hommage. Mais ils n’ont pas fait de témoignage écrit ?

M.C.B :  Comme j’ai déjà eu à le rappeler en d’autres occasions, le président Félix Houphouët Boigny disait souvent que les deux hommes les plus lus au monde sont ceux qui n’ont jamais rien écrit, il s’agit de Jésus et Mahomet. En disant cela, le Président Félix Houphouët Boigny invitait ceux d’entre nous qui seraient tentés par l’écriture de faire leur témoignage.

Le Président Houphouët Boigny étant mort depuis 1993, donc bientôt 30 ans, n’est-ce pas bien tardif pour répondre à cet appel ?

M.C.B :  Pas du tout. Dans plusieurs dizaines d’années, voire plusieurs centaines d’années, on parlera encore de Félix Houphouët Boigny, surtout en Côte d’Ivoire. On écrit pour la postérité. « Verba volant, scripta manent ». « Les paroles s’envolent, les écrits restent », dit l’adage latin. S’il est bien de rendre un hommage oral à un homme que l’on vénère, il est encore mieux de laisser une trace durable sur cet homme.

Alors Monsieur le Sénateur, quel a été le facteur déclencheur de votre volonté de faire ce témoignage sur Houphouët Boigny ? 

M.C.B :  En réalité, le déclic s’est produit dans mon esprit à l’issue d’une émission sur une chaîne de télévision ivoirienne. A cette émission, les journalistes avaient invité l’artiste Alpha Blondy, grand chanteur de reggae mondialement connu.

La Méga-star a dit alors s’être fait rafler au cours d’une patrouille des forces de l’ordre en compagnie de nombreux autres jeunes gens de mauvaise réputation. La Police reprochait à ces jeunes d’avoir fumé de la drogue. Compte tenu de la célébrité d’Alpha Blondy, cette affaire qui aurait pu être banalisée a pris des proportions si démesurées que le chanteur de reggae s’était retrouvé en présence du Président Félix Houphouët Boigny. Alors qu’il s’attendait à de fortes réprimandes, Apha s’entendit dire par le Président Houphouët : « Comment as-tu fait cela, mon fils, toi qui fais ma fierté ». En entendant ces paroles de la part du Grand Félix Houphouët Boigny, bâtisseur infatigable de la Côte d’Ivoire moderne et de l’Afrique noire, ALPHA dit avoir été stupéfait, subjugué. Or donc le Président Houphouët me connait personnellement, lui si grand et moi si petit, se disait l’artiste. Dès cet instant, le chanteur de reggae dit ne plus savoir ni dans quel monde il se trouvait, ni même s’il continuait d’exister, et il y a de quoi. Être connu du grand Homme dont l’Afrique et le monde entier parlent n’est pas une mince affaire. Et Alpha dit de cette rencontre : « J’étais liquéfié ». C’est ce jour-là, dit Alpha que j’ai décidé de changer mon comportement pour ne pas trahir la confiance du grand homme qui déclare être fier de moi. Pour tout vous dire, cette expérience vécue par Alpha Blondy ressemble fort à la mienne.

Rappelez-nous votre expérience avec le Père fondateur de la Côte d’Ivoire moderne, du moins dans ses grandes lignes ?

M.C.B :  Le récit de cette rencontre déterminante se trouve dans le témoignage que j’ai publié. Je ne vais pas la reprendre ici pour ne pas risquer le double usage. Il faut simplement retenir ceci :  le Président Félix Houphouët Boigny m’a promis la Mairie d’Anyama en 1990. Puis, dans la suite des évènements, il m’a donné l’impression de m’avoir trahi. Je me suis alors battu tout seul et, après ma victoire, j’apprends que le Président Houphouët veut me voir. J’ai d’abord catégoriquement refusé de le rencontrer. Mais finalement sur insistance du Président Henri Konan Bédié, alors Président de l’Assemblée nationale, je décide d’aller voir le président Félix Houphouet Boigny en sa résidence le couteau entre les dents pour lui cracher tout ce que j’avais sur le cœur contre lui.  Mais une fois en présidence du Président Houphouët, il me reçoit avec des mots si apaisants que je suis cueilli à froid. Comme Alpha, j’ai été moi aussi « liquéfié », conquis par le « Sage de Yamoussoukro », comme on l’appelait à cette époque. Depuis ce jour, j’ai décidé d’accorder une confiance illimitée au Président Félix Houphouët Boigny et de lui rendre hommage en toutes occasions.

Ne vous est-il pas arrivé d’avoir l’impression de faire cavalier seul dans l’exécution de ce projet ?

M.C.B :  Non !  Et je vous remercie pour cette question. D’éminentes personnalités du monde de la science et de la culture pensent que mon initiative est belle. Le Ministre gouverneur Augustin Thiam, les Professeurs Jean-Noël Loukou et Yacouba Konaté sont au nombre de ces illustres ivoiriens. Le professeur Yacouba Konaté est celui qui m’a fortement exhorté à coucher par écrit l’histoire de ma rencontre avec le président Houphouët Boigny, rencontre qui constitue l’ossature de ce témoignage.

Que pensez-vous de ceux qui disent que le RHDP, votre parti, c’est le RDR plus quelques transfuges du PDCI-RDA ?

M.C.B:  Ce n’est pas par hasard que dès l’entame, j’ai pris la précaution de faire le distinguo entre adhérer à un parti politique et le fait pour quelqu’un comme moi, d’être touché au plus profond de mon être par un homme de grande valeur morale et spirituelle tel que Félix Houphouët Boigny. Je connais ceux qui font des observations de courte vue en comparant le RHDP à la défunte LMP qui a volé en éclat parce que non assise sur un socle. Ceux-là ont prédit au RHDP le même destin catastrophique que la LMP, sans comprendre que l’on est au RHDP avec une foi solide qui s’appuie sur l’houphouëtisme, c’est-à-dire la doctrine née de la pratique de l’enseignement légué par Félix Houphouët Boigny.

Pourquoi sentez-vous aujourd’hui le besoin de raviver votre houphouëtisme par un témoignage ?

M.C.B:  Houphouët Boigny nous a légué un héritage d’une richesse incommensurable. Mais de toute cette œuvre, il y a un aspect qui est et demeure inconnu et qu’il convient de révéler au grand public. Lui le grand bâtisseur vénéré partout dans le monde, m’a donné l’impression de connaître personnellement chacun de nous dans notre vie privée, dans notre vécu quotidien. De même qu’il a eu un mot pour Alpha Blondy, le Président Houphouët m’a semblé avoir un don particulier pour parler à chacun et toucher nos cœurs. On le croyait grand au point d’être enfermé dans sa tour d’ivoire. Mais à chaque occasion, il a démontré qu’il était avec son peuple, dans son vécu quotidien et que rien, absolument rien de notre vie ne lui était indifférent, il partageait nos vies individuelles et de toute apparence, son humilité n’a fait que le grandir davantage. Il est bon de rappeler les fondamentaux de l’héritage qu’il nous a laissé afin qu’ils servent de boussole constante à toutes nos actions : progrès humain par la recherche du développement économique et social pour tous ; humanisme, amour et recherche constante de la paix dans les cœurs ; humilité et grandeur d’âme. Tels sont, entre autres, les maître-mots de la doctrine du Maître que nous avons le devoir répandre pour prolonger son œuvre. Félix Houphouët Boigny mérite d’être lu, connu, enseigné. Sa doctrine doit servir de levier et de boussole à toutes nos actions présentes et à venir. C’est pourquoi, il ne faut jamais se lasser d’expliquer comment naît en chacun de ses disciples l’houphouëtisme, cette source inépuisable de sagesse, d’amour et d’action en vue de la promotion et de l’épanouissement de l’homme, de tout l’homme. Au Professeur Jean-Noël LOUCOU, Secrétaire Général de la Fondation FHB, je voudrais exprimer toute ma gratitude pour avoir contribué de façon décisive à la publication de ce témoignage.

Réalisée par André SELFOUR

 

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