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VIVE TENSION AU BURKINA FASO
L’armée française face à la montée de l’hostilité des populations

Un convoi militaire français est bloqué au Burkina Faso par des manifestants hostiles à la France, dans un climat d’insécurité croissante dans le pays.

Si vous voulez avoir une idée de la difficulté de la mission de l’armée française dans la région sahélienne, il suffit d’observer ce qui se passe depuis quelques jours au Burkina Faso, l’un des États visés par la guerre des djihadistes.
Un convoi militaire français de plusieurs dizaines de véhicules, parti de Côte d’Ivoire et destiné au Niger, a été bloqué à plusieurs reprises par la population en traversant le Burkina Faso, et n’a toujours pas atteint sa destination. Plusieurs manifestants ont même été blessés à Kaya, dans le centre-nord du pays, où la situation a été la plus tendue. Un enfant de 13 ans qui a abattu un mini-drone français avec une fronde est devenu le héros de la foule.

L’explication est complexe. La population est d’abord sous le choc de plusieurs attaques djihadistes, dont la dernière, le 14 novembre, a fait 53 morts dont 49 gendarmes. La colère est dirigée contre le président burkinabè, Roch Marc Kaboré ; mais aussi contre la France, accusée à la fois de ne pas assez protéger la population, mais aussi, par certains, de « complicité » avec les terroristes.
Il y a d’abord une frustration légitime face à une guerre qui mobilise d’importants moyens militaires, comme ceux de cette colonne bloquée, sans pouvoir arrêter la dégradation continue de la situation sécuritaire.

Et il y a une campagne de désinformation, que Paris attribue à la Russie et à la Turquie, et qui cherche à discréditer l’action de la France. Elle est notamment accusée d’armer en sous-main les djihadistes puisque la poursuite de la guerre justifierait le maintien de la présence militaire française.

Certains témoignages font état de la présence de drapeaux russes parmi les manifestants, comme ces derniers mois au Mali, où des manifestations antifrançaises se sont également produites. A rapprocher des informations faisant état de négociations entre la junte militaire malienne et la Russie pour l’envoi de mercenaires de la société privée Wagner proche du Kremlin.

Cette situation est très embarrassante pour la France au moment où elle tente de réorganiser son dispositif militaire au Sahel, avec la fin de l’opération Barkhane et la concentration des moyens sur la lutte antiterroriste avec la force européenne Takuba.

La France paye à la fois pour sa mauvaise image d’ex-puissance coloniale, au passé trouble que le procès en cours des assassins de l’ancien Président Thomas Sankara fait remonter ; et pour les impasses des gouvernements africains qu’elle soutient. C’est à Ouagadougou qu’Emmanuel Macron avait tenté de lancer une nouvelle politique africaine, mais l’enlisement de la guerre au Sahel pèse lourdement sur tout changement de cap et d’image.

Alors que les relations sont toujours très tendues avec la junte au pouvoir au Mali, les troubles du Burkina Faso et la menace de contagion au Niger, pays-clé du dispositif français, viennent en rajouter au sentiment d’impasse au Sahel. La réponse ne peut pas être uniquement militaire, et Paris est bien désarmé pour y faire face.

Source : France Inter

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